
Près de 80% de la population aura mal au dos au moins une fois dans sa vie. Le mal de dos, maladie du siècle, est aussi le motif de consultation médicale le plus fréquent, non seulement chez les terriens mais aussi chez les astronautes.
La Nasa s’inquiète donc, et à juste titre, des effets de l’espace sur la colonne vertébrale des astronautes. Ashley Weaver, ingénieur biomédical au sein de l’Université Wake Forest de Caroline du Nord, a souligné dans un communiqué de la NASA à quel point il était important de préserver la colonne vertébrale des astronautes : « La santé de la colonne vertébrale est essentielle pour le contrôle de la posture et facilite les mouvements du tronc qui sont nécessaires aux activités d’une mission. Il est donc important que nous comprenions comment les changements musculaires sont influencés par une exposition de longue durée à la microgravité. »
De plus, ce mal de dos pour les astronautes, qui passent plusieurs mois à bord d’une station spatiale, peut être encore présent jusqu'à quatre ans après leur retour sur terre.
En 2016, une équipe de chercheurs a découvert que les muscles qui soutiennent la colonne vertébrale des astronautes s’affaiblissaient sous l’effet de la microgravité. Dans la plupart des cas, cela se traduisait par des douleurs plus ou moins violentes au niveau du dos.
Risque accru d'hernie discale.
Dans un autre article du quotidien Le Monde intitulé ‘’Comment la hernie discale de Michael Collins lui valut d’être sélectionné pour Apollo 11’’ du journaliste médico-scientifique Marc Gozlan, il est fait état, que, selon une étude de 2010, sur 36 cas de hernie discale survenus après une mission spatiale, dix ont dû faire l’objet d’une intervention chirurgicale.
Cette pathologie étant survenue le jour même du retour sur Terre, chez trois astronautes. De plus, il est constaté que les astronautes présentent également un risque accru d'hernie discale dans les mois qui suivent le retour d'un vol spatial.
Ces résultats suggèrent des mesures préventives possibles pour réduire les effets des vols spatiaux sur la colonne vertébrale. Par exemple, des exercices de renforcement du tronc, ainsi que des étirements tout comme ceux recommandés pour les patients souffrant de maux de dos sur Terre. Ces exercices ont d’ailleurs été depuis systématiquement ajoutés au programme d'entraînement des astronautes.
Rappelons dans le cas des astronautes, que cette pathologie est due à l’élargissement d’un disque intervertébral, alors que pour le commun des mortels il est plus souvent causé par le simple déplacement d’un disque. Dans les deux cas, une partie du disque fait alors saillie à l’extérieur et vient comprimer une racine nerveuse ou la moelle épinière.
Une étude, en date de 2019, a été publiée sur les travaux menés par Katelyn Burkhart (Ph D Massachusetts Institute of Technology) et son équipe qui ont travaillé sur les déformations des muscles du dos des astronautes après un long séjour à bord d’une station spatiale. Cette étude révèle que : « les modifications de la morphologie des lombaires induites par les vols spatiaux peuvent contribuer aux douleurs dorsales communément rapportées chez les astronautes ». Les examens ont en effet montré une réduction de la taille des muscles du dos. De plus, les scanners ont également montré une augmentation de la quantité de tissu graisseux présent dans les muscles paravertébraux. Ceci ayant comme conséquence : « que la densité musculaire des astronautes, inversement liée à la teneur en matières grasses, est passée de 5,9 à 8,8%. »
Pour la plupart des muscles, la composition est revenue à la normale après une année passée sur terre.
Comme l’explique à ce propos le docteur Marc Goslan toujours dans l’article du journal Le Monde du 16 juillet 2019 : « Il est probable que cela soit en rapport avec la perte de courbure du dos (lordose lombaire) du fait de l’élongation de la colonne vertébrale, induite par l’élargissement des disques intervertébraux sous l’effet de l’impesanteur. »
Accroissement de la taille.
Dès 2013, la Nasa avait confirmé et révélé que les astronautes pouvaient voir leur taille croître de 3 à 5 centimètres selon les cas.
Quelques exemples :
- En 2016, après un an dans l’espace, Scott Kelly a grandi de deux pouces (soit 5,08 cm).
- En 2017, l’astronaute français Thomas Pesquet avait gagné 2 cm après une mission de six mois dans l'espace.
- En 2018, un astronaute japonais du nom de Norishige Kanai a révélé que sa taille avait augmenté après avoir passé trois semaines dans l’espace. Sur Twitter, il avait même indiqué avoir gagné 9 cm après son séjour dans l’espace : « Je ne suis que dans l’espace depuis trois semaines et je n’ai pas grandi comme ça depuis le collège » .... Avant de s'apercevoir que sa mesure était erronée. Il n’avait en fait pris que 2 centimètres !
Cause de ce gain de quelques centimètres : l'absence de gravité qui permet à la colonne vertébrale, qui n'a plus à soutenir tout le poids du corps, de se détendre à son aise. Sur Terre, les disques de la colonne vertébrale sont légèrement comprimés par la gravité. Par contre, en orbite, l’absence de gravité implique que les disques ne subissent plus ce poids, ils s’étendent donc, ce qui rallonge inévitablement la colonne vertébrale.
Comme l’explique Guillemette Gauquelin-Koch responsable du programme Science de la vie au Centre national d'études spatiales : « Ce sont les disques entre les vertèbres qui se distendent car de l'eau rentre à l'intérieur. Ce même phénomène se produit sur Terre quand le corps humain est à l'horizontal. Tous les hommes gagnent environ un centimètre par nuit de sommeil. Mais le corps se tasse rapidement dès qu'il est en station debout. Même chose chez les astronautes : ils retrouvent leur taille initiale dans la dizaine ou la quinzaine de jours qui suit leur retour sur Terre ».
Néanmoins, on a constaté que ce ‘’retour à la normale’’ au niveau de la taille pouvait prendre sur certains sujets quelques mois et non seulement quelques jours. Les problèmes de dos contractés dans l’espace et le ‘’retour à la normale’’ peut se réaliser très souvent au prix d’épisodes douloureux et au risque de souffrir d’une hernie discale.
Des muscles vertébraux atrophiés à cause de la microgravité.
Quand les muscles paravertébraux situés autour de la colonne ne servent pas au soutien du corps et que les astronautes flottent dans l'espace, ces muscles s'atrophient. Bien connaître ce phénomène permettrait de trouver des moyens pour limiter les douleurs lombaires lors des missions spatiales, notamment sur Mars.
Nelly Lesage, Journaliste sciences sur le site numerama.com souligne que : « les conséquences du voyage spatial sur l’organisme sont complexes et font régulièrement l’objet d’expérimentations. D’où l’intérêt, également, de soumettre les astronautes de retour de l’ISS à toute une batterie d’examens, afin de comprendre plus finement les effets physiologiques du voyage spatial et d’en tirer éventuellement profit, pour traiter des cas médicaux qui, eux, sont bien terrestres. »
Problème des scaphandres.
L’anecdote peut sembler amusante, mais il faut tenir compte de ce paramètre pour les vols habités, notamment à propos des scaphandres qui permettent de sortir dans l’espace.
Plusieurs astronautes ont ainsi remarqué que le réglage de taille appliqué en entraînement sur Terre devait être modifié dans l’espace, en raison des quelques centimètres gagnés en impesanteur.
Par exemple, en 2019, l’Américaine Anne McClain s’est rendue compte qu’une fois à bord de la Station spatiale internationale, pour accomplir une sortie, elle était plus à l’aise dans une taille bien précise du torse du scaphandre alors qu’au sol elle pouvait utiliser deux des trois tailles disponibles.
https://www.cite-espace.com/
Récemment, la NASA a émis de nouvelles inquiétudes sur les effets de l’espace sur la colonne vertébrale des astronautes. Pour l’Agence spatiale américaine : « il est important de trouver rapidement un moyen d’envoyer des astronautes dans l’espace sans pour autant mettre en danger la santé de leur colonne vertébrale. »
C’est pourquoi actuellement, l’agence spatiale américaine, tout comme la Chine, la Russie et l’Europe, mène donc des recherches pour trouver des solutions visant à garantir la santé de la colonne vertébrale des astronautes. Les chercheurs consacrent désormais plus de temps sur les changements des masses osseuses et musculaires chez les astronautes ayant passé des périodes beaucoup plus longues dans l’espace.
Également, et suite aux conseils d’une étude de l'université de San Diego, la Nasa a modifié certains exercices physiques pour les astronautes hors et dans la capsule reposant sur un renforcement des muscles du dos et du cou.
« C’est important que nous comprenions comment les changements musculaires sont influencés par une exposition de longue durée à la microgravité », souligne Ashley Weaver de l’Université Wake Forest de Caroline du Nord.